Lorsqu’on enfile un vêtement, on est loin d’imaginer la quantité de ressources, d’énergie et de pollution qu’il représente… La mode est actuellement l’une des industries la plus polluante sur Terre. Pourtant, tout peut encore changer. Privilégier les modes de production écoresponsables, consommer mieux et moins permettrait de réduire significativement l’impact du textile sur la planète. En attendant, pourquoi nos vêtements qui voyagent à travers le monde sont-ils si peu écolos ?
1. À la base d’un vêtement, les matières premières
Sans matière, point de vêtements. À l’origine d’un textile, il y a des matières naturelles (d’origine animale ou végétale) et/ou des matières « chimiques » (synthétiques ou artificielles). Opter pour des matières naturelles est-il plus écologique ? Pas forcément.
Les matières naturelles
Animales : laine, soie, cuir, fourrure…
Les matières naturelles animales proviennent d’animaux d’élevage. Au-delà des considérations éthiques (conditions d’élevage, abattage des animaux…), l’élevage intensif va à l’encontre des pratiques « bonnes pour la planète » puisqu’il nécessite l’emploi de pesticides et d’insecticides. De plus, l’élevage d’animaux est à l’origine d’une bonne partie des émissions de gaz à effet de serre.
Végétales : coton, lin, chanvre…
Faciles et rapides à cultiver, le chanvre et le lin produisent des fibres écoresponsables. En revanche, leur transformation est longue, complexe et assez coûteuse. L’industrie textile privilégie donc le coton, plante assez fragile mais bien plus rentable. Le hic, c’est que la culture du coton nécessite bien plus de pesticides et d’eau douce que la plupart des autres végétaux. Ces gros besoins entraînent la pollution des sols, ainsi que des risques sanitaires et le tarissement de nappes phréatiques, lacs et rivières…
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Pour finir, les matières naturelles (laine, coton…) doivent être débarrassées de leurs impuretés. Peu importe leur nature et leur provenance, on achemine volontiers la production vers l’Asie. Les conditions y sont très avantageuses pour effectuer cette opération de nettoyage, mais cela n’arrange pas l’état des ressources en eau douce sur ce continent.
Les matières chimiques
Synthétiques : polyester, acrylique, nylon, lycra…
Toutes les fibres synthétiques sont issues d’une même matière première : le pétrole, une industrie pas vraiment ecofriendly. Il n’est pas rare d’y ajouter des substances chimiques peu recommandables afin d’apporter certaines propriétés spécifiques aux textiles.
Artificielles : viscose, Lyocell, Tencel…
Les composés des matières premières textiles artificielles sont d’origine naturelle (cellulose de bois, pulpe de bambou…) Pourtant, quand on y regarde de plus près, la production de ces fibres contribue à la déforestation (bambou, eucalyptus), les processus de fabrication sont particulièrement polluants et les fibres sont souvent mêlées à d’autres substances bien moins naturelles. Pas très écolo, tout ça.
En savoir plus sur les fibres textiles :
2. Et la matière devient textile
Du fil au tissage ou tricotage
Il est temps de transformer toutes ces fibres en tissu : destination l’Asie (si ce n’est déjà fait) où se trouvent la majorité des usines de filature et de tissage et tricotage. Au cours de ces deux étapes, les fibres sont traitées pour faciliter leur passage dans les machines de transformation (agents lubrifiants, humidificateurs, graisse, cire…) Il faut ensuite les débarrasser de ces résidus polluants en les lavant. Les eaux usées chargées de ces substances difficilement biodégradables terminent généralement dans les nappes phréatiques… Quant au tissu, il a désormais fière allure : prêt pour les opérations d’ennoblissement.
L’ennoblissement du tissu : teinture, tannage, apprêt…
Vient le temps des dernières finitions, pas seulement gourmandes en énergie. Il faut décolorer le tissu et éventuellement lui apporter des propriétés particulières à l’aide d’apprêts (teinture, mercerisage…) Les processus d’ennoblissement font appel à près de 4 000 produits chimiques, parmi lesquels se trouvent de nombreuses substances nocives : chlore (blanchiment), métaux lourds et colorants synthétiques (teinture), COV (Composés Organiques Volatiles), formaldéhyde et substances perfluorées (apprêt chimique)…
Côté cuir, 85 % des peaux font l’objet d’un tannage minéral : un véritable fléau pour l’environnement et la santé en raison des produits polluants et cancérigènes employés (sels de chrome, de fer…)
Les usines occidentales sont soumises à des normes de sécurité. Ce n’est pas le cas dans les pays émergents tels que l’Inde, qui sont aussi les plus compétitifs dans le domaine. Les régions du monde les plus productives sont donc les plus exposées aux risques sanitaires et environnementaux liés aux rejets de l’industrie textile : pollution de l’air, de l’eau et du sol.
Mais l’aventure du textile continue : les rouleaux de tissus colorés et préparés pour résister aux faux-plis, aux tâches ou à l’eau ainsi que les peaux tannées sont fin prêts à être transformés en vêtements ou en accessoires.
3. Du textile fini au vêtement : la confection
Après avoir été acheminés jusqu’à une usine de confection, généralement située au Bangladesh ou au Pakistan, les rouleaux d’étoffe sont détendus, découpés et étalés pour vérifier les éventuels défauts. Les coupons obtenus sont ensuite empilés pour faciliter la découpe des différentes pièces du vêtement suivant le patron. Puis les pièces sont cousues « à la chaîne » par des ouvrier(e)s en suivant un parcours défini : le vêtement passe d’une machine à coudre à l’autre, de petite main en petite main, chacune assemblant de manière répétitive une partie précise du vêtement final.
L’impact environnemental de la confection d’un vêtement est minime, mais cette étape soulève de nombreuses questions éthiques, liées à des conditions de travail souvent désastreuses.
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4. Les derniers préparatifs
Vérifications, tri et emballage
Tous les vêtements confectionnés sont ensuite vérifiés une dernière fois. Nombre d’entre eux finissent leur vie dans une benne avant même de l’avoir commencée. Ils rejoignent les chutes de tissus inutilisées qui finissent également à la poubelle. On est loin du zéro déchet…
Le reste de la production est repassé, plié et emballé dans des sachets plastique individuels, puis dans des cartons avant d’être expédié.
Transport : la grande odyssée
Un vêtement parcourt plusieurs dizaines de milliers de kilomètres par voie aérienne ou maritime avant d’arriver en entrepôt ou en magasin par des camions de frêt. Cette distance impressionnante englobe l’ensemble des phases de production réalisées aux 4 coins du globe pour profiter des tarifs les plus compétitifs. Ces nombreuses escales permettent de produire au prix le plus bas, mais elles font grimper en flèche l’empreinte carbone d’un vêtement.
5. Beaucoup de vêtements achetés, une durée de vie limitée
Pour les fabricants, produire massivement des vêtements implique qu’ils soient ensuite achetés en masse. Il faut écouler les stocks le plus vite possible et assurer un roulement permanent. Au sein des espaces de vente, tout est mis en oeuvre pour alimenter le cercle vicieux et encourager les achats d’impulsion : arrivage constant de nouveautés, placement/déplacement stratégique des articles en magasin, promotions abusives, etc.
Mais une fois achetés, nos vêtements n’ont qu’une durée de vie très limitée. D’une part, parce que la qualité de ces habits low cost laisse à désirer. D’autre part, parce nous nous lassons très vite de ces articles qui, sans être forcément usés, sont facilement remplaçables par de nouvelles pièces encore plus tendance.
De plus, nous ne ménageons pas nos vêtements : les lavages fréquents à haute température, le séchage et le repassage contribuent à réduire leur durée de vie. Cet entretien intensif nuit aussi à la planète : consommation d’énergie, rejet de produits de lavage polluants. Quant aux vêtements composés de fibres synthétiques, ils se « décomposent » au fil des lavages et libèrent de micro-particules de plastique qui finissent dans les océans…
Au final, nous achetons deux fois plus de vêtements qu’en 2002, mais nous les portons deux fois moins longtemps. Que deviennent-ils ensuite ?
6. Et après ?
Chaque seconde dans le monde, 2 600 kg de vêtements sont incinérés ou enfouis. Parmi eux, des vêtements usagés, mais aussi des vêtements neufs et invendus. Les vêtements usagés sont loin d’être tous biodégradables. Ils terminent encore trop souvent avec les ordures ménagères (2,3 % des déchets collectés) alors qu’ils pourraient être réutilisés ou recyclés via des points de collecte. Concernant les invendus, il faudra attendre encore un peu pour les marques implantées en France ne soient obligées de donner ou de recycler leurs produits textiles neufs. En attendant l’application d’une loi antigaspillage prévue pour 2022, les « excès de production » sont régulièrement détruits.
Quelles solutions les marques utilisent-elles pour limiter le gaspillage textile ?
En résumé, la production de nos vêtements au rythme de la fast fashion contribue largement à la pollution des sols, de l’air et de l’eau, à l’épuisement des ressources naturelles, à la déforestation, à la perturbation des écosystèmes. Choisir un vêtement en fonction de sa matière s’avère insuffisant : il faut aussi savoir d’où il vient et comment il a été fabriqué.
Après l’électroménager et l’alimentation, la mode est désormais dans la ligne de mire du gouvernement français. Celui-ci planche depuis plusieurs mois avec 70 grandes marques sur un projet d’affichage environnemental pour les produits textiles. Le « nutri-score de la fringue » est en préparation, et il devrait encourager les consommateurs à consommer plus responsable. Saura-t-il convaincre les industriels de faire les efforts nécessaires dans les domaines de l’innovation, de la transformation et de l’efficience écologique ?
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