©modus intarsia
Depuis peu, la laine canine fait les yeux doux à l’industrie de la mode. Pourtant, le pelage canin figure depuis longtemps parmi les fibres textiles d’origine animale. Pourquoi peut-on désormais l’envisager comme une matière haut de gamme ?
Aujourd’hui, le poil de chien suscite l’intérêt par ses propriétés textiles et ses avantages écologiques. Douce, chaude, durable (et inodore), la fibre issue du sous-poil canin permet de tisser ou tricoter des lainages douillets.
On redécouvre avec plaisir cette matière première courante mais pas banale, cette fois présentée sous son meilleur jour. De toute évidence, le pelage du meilleur ami de l’homme n’a pas fini de nous étonner !
Sur les traces de la laine canine
La laine canine semble être une tradition ancienne, mais peu répandue. Cette fibre pourrait avoir été utilisée pour compenser l’absence d’espèces traditionnellement utilisées pour leur laine. En effet, le passé de la laine canine aurait tendance à montrer que les peuples qui l’utilisaient étaient implantés dans des zones géographiques peu propices à l’élevage d’animaux domestiqués tels que le mouton, la chèvre, le lama, le chameau ou le lapin.
On sait par exemple que le Salish Wool Dog, une race canine aujourd’hui disparue, a jadis été sélectionné et élevé par certaines tribus amérindiennes qui tissaient de chaudes couvertures à partir de son long pelage blanc.
Encore aujourd’hui, quelques artisans français proposent aux propriétaires d’animaux de compagnie de récupérer et de filer le sous-poil de leur chien (ou de leur chat) au rouet traditionnel.
La première fibre industrielle issue du pelage de chien
Au-delà du Rhin, la laine canine se démocratise. Elle s’affiche depuis peu au grand jour, assumant pleinement ses origines animales. Ce tournant doit beaucoup à une innovation de la marque allemande Modus Intarsia, sous la houlette d’Ann Cathrin Schönrock (créatrice de mode spécialisée dans le développement durable) et de Franziska Uhl (ingénieure textile à l’Université de Reutlingen). Leur collaboration a permis de développer la production industrielle de Chiengora®, un fil de laine de très haute qualité, élaboré à partir de sous-poil canin. Comme son nom l’indique, cette nouvelle fibre se situe à mi-chemin entre cachemire et angora. Du point de vue des utilisateurs, elle s’apparente à « une combinaison de coton, de mohair et de soie » pour la sensation sur la peau et la chaleur.
Pour couronner le tout, les produits et le fil Chiengora® se revendiquent « régionaux et économes en ressources » en plus d’être doux, gonflants et moelleux… La marque ne compte pas en rester là et envisage de développer des fils à partir de laine de chat ou de crin de cheval.
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Une fibre durable, éthique et respectueuse des animaux
Dans un secteur textile sensibilisé à l’éthique et au respect de l’environnement, la laine canine arrive à point nommé. En parfaite adéquation avec le concept du surcyclage (ou upcycling), cette fibre naturelle permet de valoriser un sous-produit sans nécessiter de grande transformation… et bien évidemment sans souffrance animale.
Le toilettage des animaux de compagnie est en effet connu pour favoriser le bien-être de nos compagnons à 4 pattes. Chaque année, en Europe, le brossage et les soins de toilettage génèrent plus de 1 000 tonnes de sous-poils inutilisés et jetés. Des déchets que l’on sait désormais transformer en fibres textiles haut de gamme !
Par ailleurs, ces fibres disponibles à l’échelle locale n’ont pas besoin de parcourir des milliers de kilomètres en avion pour être transformées en fil. Pour s’approvisionner en poil de chien, Modus Intarsia a d’ailleurs mis en place un réseau de collecte auquel chacun peut participer : propriétaire de chien, toiletteur, éleveur canin…
Pour finir, la société ne tire aucun profit direct de cette collecte de matières premières dont les bénéfices sont reversés à différentes associations de protection animale.
Ann Cathrin Schönrock (à gauche) et Franziska Uhl (à droite) avec des fibres de laine provenant de poils de chien. ©modus intarsia
Récolte et transformation
Seuls les chiens à poils longs ont un pelage compatible avec la production de laine canine. Sans surprise, sa qualité et sa douceur dépendent du type de poil utilisé. C’est pourquoi il est recommandé de récolter uniquement le sous-poil en brossant les parties du corps où il est le plus soyeux (poitrail, flancs, ventre…), de préférence durant les périodes de changement de pelage.
Une fois récolté, le poil est éventuellement trié puis ensuite filé et mis en écheveaux. Un lavage très soigneux des fibres à l’eau chaude permet d’éliminer saletés, produits antiparasitaires et agents allergènes éventuels, mais aussi de les débarrasser de toute mauvaise odeur.
Au cours de ces différentes étapes de transformation, le volume de laine initial diminue de 10 à 20 %.
Quelles applications pour la laine canine ?
Tout comme la laine traditionnelle, la laine canine peut être teinte et filée, de manière à être utilisée dans la confection de pulls, chaussettes, bonnets, écharpes, étoles, châles…
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