recyclage ©Soex
L‘automatisation du recyclage textile se développe pour gérer un flux exponentiel de matériaux usagés, et répondre à la demande croissante de matériaux recyclés. L’enjeu est à la fois écologique et économique : recycler en France est un bon moyen de relocaliser la filière textile en fermant la boucle de l’économie circulaire.
Pour gagner en productivité, les technologies ne cessent de se perfectionner : encore en développement il y a 3 ans, la spectrométrie remplace progressivement l’oeil et le toucher humains. Plusieurs lignes de tri automatisées sont déjà implantées en Europe. Où en est l’automatisation du recyclage dans le secteur textile et quels sont les projets connexes ?
Le second hand est tendance et c’est tant mieux : en 2021, 58 % des produits textiles usagés déposés en centre de tris conventionnés ont pu être réutilisés (source : Ministère de l’Écologie).
Après un premier tri manuel pour séparer « le bon grain de l’ivraie », la fraction de produits réellement en fin de vie (déchirés, abîmés et donc recyclables) représente donc 42 % des textiles « récupérés » par les entreprises de recyclage.
Ce chiffre devrait significativement augmenter dans les années qui viennent, en raison de la baisse de qualité des produits. D’autant plus que dès 2025, les lois environnementales européennes obligeront les professionnels à trier et collecter séparément leurs déchets textiles. Par ailleurs, le développement des plateformes de vente de vêtements d’occasion pour les particuliers devrait réduire la proportion de vêtements collectés en bon état.
Refashion, l’éco-organisme français de la filière TLC (Textile, Linge et Chaussures), a dressé récemment un bilan de l’automatisation du recyclage textile, ces procédés qui facilitent le tri sélectif par matière et par couleur, afin de revaloriser des déchets textiles au mieux de leurs capacités.
Automatisation du recyclage textile : les plateformes européennes innovantes se multiplient
Les machines de tri matière, tapis roulants, caméras et spectromètres permettent aujourd’hui de gagner un temps précieux et de trier des volumes de déchets textiles conséquents, pouvant atteindre 1 tonne/heure.
À l’heure actuelle, 6 lignes de tri automatisé sont déjà opérationnelles en Europe : COLEO Recycling (Espagne), Salvation Army (Grande-Bretagne), SYSAV (Suède), Wieland Textiles (Pays-Bas), SOEX (Allemagne). En France, ces innovations sont portées par le CETIA (Pays Basque), plateforme d’innovations pour la recyclabilité du textile et du cuir.
D’autres projets ne tarderont pas à voir le jour : Synergies TLC en France, LSJH en Finlande, TEXAID en Suisse allemande… Sur ces sites de recyclage nouvelle génération, la spectrométrie proche infrarouge (NIR), déjà employée depuis plusieurs décennies pour le tri des emballages ménagers, a été adaptée aux spécificités des textiles.
©refashion
Un système performant, mais perfectible
Les technologies permettant l’identification et le tri des textiles usagés non réutilisables ont évolué, mais l’étude menée par Refashion en pointe les limites actuelles.
Un spectromètre s’avère très efficace pour identifier le coton et le polyester, beaucoup moins lorsqu’il s’agit de reconnaître une matière mélangée. Il en est incapable si la composition précise du tissu n’a pas été préalablement intégrée à sa base de données. De plus, le processus d’identification se limite à la surface du textile, ce qui pose problème dans le cas de pièces appliquées, contrecollées, doublées, rembourrées, etc. D’autres éléments peuvent être source d’erreurs : traitements et apprêts, pigments sombres… La solution la plus appropriée serait de généraliser l’utilisation d’une « carte d’identité » intégrant l’ensemble des informations pour chaque pièce textile (type de produit, matériaux…) Envisagé sous la forme d’un étiquetage (QR code, puce RFID, dispositif NFC…), un tel projet semble complexe à mettre en place, comme le note Refashion.
Par ailleurs, reste la problématique des « points durs » : rivets, pressions, fermetures à glissière, boutons, mais aussi fonds de poches, doublures etc. L’opération de délissage, qui consiste à retirer ces « éléments perturbateurs » afin de pouvoir recycler les fibres, coûte cher lorsqu’elle est réalisée manuellement à l’aide de ciseaux ou d’emporte-pièces… À l’heure actuelle, les procédés automatisés consistent en un délissage des textiles par effilochage. D’autres solutions automatisées sont en phase de R&D (délissage sur chiquettes, découpe automatisée sur-mesure). Plus coûteux, ces procédés qui permettent de découper de larges zones de textiles pourraient s’appliquer aux matières haut de gamme. En attendant, pourquoi pas, d’aborder les choses différemment en anticipant le recyclage d’un produit dès sa conception initiale ?
Déposez gratuitement votre projet sur Textile Addict,Besoin des conseils d'un spécialiste textile ?
recevez des devis qualifiés et sélectionnez le freelance idéal.
Renaissance textile, un bel exemple de recyclage textile à la française
Pour Renaissance textile, la France ne manque pas de ressources. Réduire la dépendance aux fibres neuves n’est pas un problème, puisque « un champ de coton se trouve dans nos armoires » !
Unique en France, cette plateforme industrielle de recyclage textile s’engage en faveur du Textile Circulaire®, dont elle a fait son cheval de bataille. De quoi diviser par 10 l’empreinte carbone de chaque kilo de tissu, créer des emplois dans les filatures, chez les tisseurs et tricoteurs, et dans l’ennoblissement… Les processus automatisés de découpe, délissage, et l’effilochage mécanique des vêtements permettent d’obtenir une « matière première secondaire » de qualité premium, issue de déchets textiles.
L’entreprise, qui cible pour l’instant le recyclage de vêtements professionnels, travaille déjà avec la blanchisserie de l’Hôpital de Nantes. 85% des textiles récupérés sont transformés en fibres, vendues ensuite au même prix qu’une fibre naturelle et utilisées pour confectionner de nouveaux vêtements professionnels, ou du prêt à porter. La boucle est bouclée… Renaissance textile a déjà prévu d’ouvrir 3 nouvelles lignes de production d’ici 2026.
Reserve Resources, une interface mondiale au service du recyclage textile
La plateforme numérique SaaS Reserve Resources s’est donné pour mission d’identifier précisément et de cartographier les flux de déchets textiles et de déchets post-consommation à travers le monde pour mieux les canaliser. Elle souhaite ainsi faciliter la tâche aux différents acteurs du recyclage textile (collecteurs, trieurs et recycleurs) en reliant l’offre à la demande. Proposée en libre accès, la plateforme se veut une interface digitale au service de l’économie circulaire, afin d’accélérer les processus de recyclage et d’en réduire le coût.
À l’échelle française, européenne et mondiale, des solutions se mettent en place pour permettre d’intensifier le « recyclage du textile en textile ». Autant d’initiatives qui ouvrent la voie au recyclage industriel de masse, pour conduire les déchets textiles à devenir une réelle source d’approvisionnement, fiable, durable et qualitative.
À lire :
RECYCLAGE TEXTILE : Les 11 projets innovants des industriels français
Les enjeux du recyclage au sein du secteur textile et de la mode
Loi AGEC, une loi anti-gaspillage pour une filière mode et textile plus transparente