Technique : les étapes de création d’un ruban de mode

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©Julien Faure

 

Avantagé par son petit format et ses multiples possibilités d’applications, le ruban déroule son histoire depuis plusieurs siècles. En France, le ruban de mode a connu ses plus belles heures au XIXe siècle à Saint-Etienne, où l’art de la rubanerie témoigne encore d’un savoir-faire et d’une créativité inégalés. Porté par plusieurs entreprises renommées, le « beau ruban » a repris du galon ces dernières années, retrouvant sa place dans l’industrie de la mode et du luxe. Derrière chaque centimètre d’étoffe, il y a un métier à tisser complexe à la mécanique bien rodée, des matières nobles et une main-d’oeuvre hautement qualifiée. Quelles sont les étapes qui permettent de transformer un fil en ruban haute couture

 

 

Les particularités du ruban de mode

 

Comme la plupart des étoffes, le ruban est obtenu par tissage de fils chaîne et trame, mais il atteint rarement plus d’une trentaine de centimètres de largeur. Cette étroitesse fait sa singularité et lui permet d’être utilisé de manière frivole ou utile : ornements de vêtements, de lingerie, étiquettes, packaging, contention médicale

Son deuxième signe particulier est le liseré qui borde chacun de ses côtés, une double lisière qui lui apporte une grande solidité. Cette bande de tissu doit beaucoup à la mécanisation de l’industrie textile et c’est grâce à l’invention de la mécanique Jacquard qu’elle a pu atteindre un tel degré de raffinement. 

 

 

 

Du motif au ruban de mode, presque un travail d’orfèvre

 

1/ Le fil et sa préparation : teinture et moulinage

 

Un ruban, c’est avant tout du fil. La tradition du ruban haut de gamme veut que le fil soit tissé-teint, c’est-à-dire préalablement teinté et mouliné avant d’être tissé, une spécificité qui lui permet d’être travaillé en motifs multicolores

Selon les caractéristiques attendues du produit final, ce fil peut être composé de soie, de coton, de polyester… On peut ainsi privilégier la soie pour sa noblesse, sa douceur et son éclat, le polyester pour sa solidité et sa facilité d’entretien, le coton pour sa souplesse, ou mélanger les matières pour créer un jeu de couleurs et de textures

 

2/ Conception

 

Avant de passer à la fabrication d’un ruban, il faut créer un motif compatible avec le métier à navettes à mécanique Jacquard.

On dit souvent du métier Jacquard qu’il est l’ancêtre de l’ordinateur : son principe de fonctionnement a posé les bases de l’informatique. Le système Jacquard repose sur l’utilisation de cartes perforées suivant un code binaire 0-1. Il faut créer un « jeu de cartons » afin de transposer le motif envisagé sur des cartes perforées, en alternant zones trouées et zones pleines. Lors du tissage, ce « programme » guide les crochets : les perforations entraînent le soulèvement de certains fils de chaîne à chaque passage de navette pour créer le motif. 

Le travail de design s’effectue en 3 étapes : 

– le dessinateur élabore un motif (esquisses et dessin),

– le metteur en carte se charge de convertir le motif en fils croisés afin de le reproduire sur des cartes quadrillées

– le liseur s’occupe du travail de perforation. De nos jours, celui-ci s’effectue rarement à la main : les cartons perforés et lacés d’antan ont laissé place à de longues bandes de plastique, plus précises, moins encombrantes et beaucoup plus rapides à perforer (perforation électronique grâce à des logiciels).

Les cartes perforées sont encore utilisées sur quelques métiers à tisser traditionnels, mais elles sont généralement remplacées par des logiciels de CAO/FAO (Conception et Fabrication Assistée par Ordinateur). Le contrôle par ordinateur de ces métiers à tisser Jacquard nouvelle génération permet d’intervenir à tout moment sur le dessin, les armures et les lisières pour effectuer des modifications. 

 

 

 

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3/ Le montage et le tissage

 

L’utilisation du métier Jacquard nécessite un montage minutieux des fils. Une grande partie de ce travail de précision est encore réalisée à la main. 

 

  • Ourdissage : le fil est enroulé de manière à former une rangée de plusieurs centaines de fils parallèles. Cette nappe de fils parfaitement alignés est installée sur le métier à tisser. Elle constitue la chaîne du ruban, c’est elle qui détermine sa longueur

 

  • Montage : la chaîne est reliée au métier à tisser par les lisses. Chacun des fils de chaîne est glissé dans une lisse, barrette de métal percée d’un trou. Les fils sont ensuite passés un par un dans un peigne qui maintient les fils en place. La largeur du peigne détermine celle du ruban. Chaque fil de chaîne est géré par un crochet qui se soulève ou s’abaisse en suivant le programme des perforations.

 

  • Navettes : les navettes effectuent des allers et retours à travers les fils de chaînes. Sur chacune d’entre elles, on installe une canette de fil : ce sont elles qui tissent la trame du ruban et constituent la couleur de fond du motif. 

 

Après avoir effectué l’ensemble du montage et les derniers ajustements, le tissage du ruban peut commencer : il se déroule idéalement dans une atmosphère humide (taux d’hygrométrie de 60 %) pour éviter au fil d’être sec et cassant.

 

 

À lire :

Le ruban : son histoire, sa technique

Les étapes de création d’un motif tissé Jacquard

La sabreuse de rubans

 

Image de Elsa Laurent

Elsa Laurent

Designer dans l’industrie textile en habillement et en ameublement, je suis co-fondatrice de Textileaddict.me depuis 2017. J'aime partager mes connaissances et bons plans du textile mode et maison. Mon objectif : permettre aux acteurs du secteur de se mettre facilement en relation pour développer leurs projets.