
| Mis à jour 07/2025 |
Le crochet est une technique artisanale qui permet de confectionner toutes sortes d’ouvrages en mailles (vêtements, accessoires, déco…) Créatif, bohème et authentique, ce proche parent du tricot aux faux-airs de dentelle demande un certain savoir-faire. Après avoir traversé les époques en se renouvelant régulièrement, il a aujourd’hui retrouvé la place qu’il mérite. Textile Addict a dénoué tous les petits secrets du crochet !
La technique du crochet
Matériel nécessaire pour le crochet
Un ouvrage au crochet est toujours réalisé à la main. Le procédé ne nécessite qu’un seul outil, un crochet (aiguille dotée d’une encoche et d’une extrémité recourbée) et bien sûr une pelote de fil.
Le crochet peut être en bois, en plastique, en acier ou en aluminium. Il existe différents modèles de diamètres et de longueurs variables, à choisir en fonction de la technique envisagée et de l’épaisseur du fil à travailler. Il est même possible de travailler des laines très épaisses uniquement à la main, en utilisant son index en guise de crochet.
Tous les types de fils peuvent être crochetés, à condition d’utiliser un outil aux dimensions adaptées. Le fil peut être en coton, laine, soie ou lin, mais on peut aussi crocheter des fils fantaisie ou métalliques… Le crochet offre également de belles possibilités d’upcycling avec le trapilho, un matériau issu des chutes de l’industrie textile (lisières, etc.) Parfois nommé lirette, fil zpagetti ou t-shirt yarn, ce fil ruban assez épais est constitué de bandelettes de tissu recyclé. Il se travaille facilement à l’aide d’un gros crochet et permet de réaliser des objets décoratifs, bijoux, accessoires de mode, etc.
Le principe du crochet
Cette technique ressemble beaucoup au tricot : le procédé consiste à entrelacer des boucles pour créer une étoffe. Les mailles sont formées une à une, mais contrairement au tricot, il n’y en a qu’une en attente sur le crochet.
Les points de base du crochet sont la maille en l’air ou maille chaînette (pour monter l’ouvrage), la maille coulée (bordures, diminutions, etc.), la maille serrée et les brides (demi-bride, bride et double bride). Il existe également une grande variété de points plus complexes qui permettent de créer des reliefs, des motifs aérés façon guipure ou dentelle « grossière », ou de réaliser des projets en volume…
Le Crochet Industriel : Une Révolution dans la Production Textile
Le crochet industriel, bien que moins connu que son pendant manuel, joue un rôle croissant dans l’industrie textile grâce à l’utilisation de machines spécialisées, telles que les machines à crocheter Comez ou les machines à aiguilles composées, qui permettent une production à grande échelle de tissus complexes. Contrairement au crochet manuel, qui repose sur des boucles formées individuellement à l’aide d’un crochet, le crochet industriel utilise des équipements automatisés capables de produire des textiles comme des rubans élastiques, des dentelles techniques ou des tissus pour applications médicales et industrielles. Selon un rapport de Persistence Market Research, le marché mondial des machines à crocheter est en expansion, avec une demande croissante pour les machines automatiques, qui représentent une part significative de la croissance en raison de leur efficacité et de leur capacité à produire des motifs complexes à haute vitesse. Ces machines, comme les modèles à rubans élastiques ou à dentelles, sont particulièrement prisées en Asie, où des pays comme la Chine et l’Inde dominent la production textile grâce à des coûts de main-d’œuvre réduits et des infrastructures développées. L’intégration de technologies comme la numérisation 3D et l’intelligence artificielle, présentée lors de l’ITMA 2023 à Milan, améliore la précision et réduit les déchets, alignant le crochet industriel sur les objectifs de durabilité. Ce secteur, bien que moins artisanal, contribue à démocratiser les produits d’inspiration crochetée tout en répondant aux besoins industriels.
Machine à crocheter ©Comez
Comparatif des techniques de crochet, dentelle et tricot
Critère | Crochet Manuel | Crochet Industriel | Dentelle Manuelle | Dentelle Industrielle | Tricot Manuel | Tricot Industriel |
---|---|---|---|---|---|---|
Technique | Utilisation d’un crochet pour former des boucles une à une, créant des motifs uniques. | Machines automatisées (ex. Comez) produisant des textiles complexes à grande échelle. | Fait main avec fuseaux ou aiguilles, créant des motifs délicats et ajourés. | Machines à dentelle (ex. Leavers) pour produire des motifs fins à haute vitesse. | Utilisation d’aiguilles pour former des mailles, souvent plus structuré que le crochet. | Machines à tricoter (ex. Shima Seiki) pour une production rapide et uniforme. |
Temps de production | Lent, dépend de la complexité (ex. : 10-20 h pour une couverture). | Rapide, capable de produire des mètres de tissu en quelques heures. | Très lent, un napperon peut prendre des jours à des semaines. | Très rapide, des kilomètres de dentelle produits quotidiennement. | Modérément lent, selon le projet (ex. : 5-15 h pour un pull). | Très rapide, des vêtements complets produits en minutes. |
Applications | Vêtements, décorations, amigurumi, accessoires personnalisés. | Rubans élastiques, dentelles techniques, textiles médicaux, vêtements de masse. | Nappes, vêtements haute couture, voiles, décorations délicates. | Vêtements, lingerie, rideaux, applications industrielles. | Pulls, écharpes, couvertures, vêtements personnalisés. | Vêtements, textiles techniques, upholstery, production de masse. |
Avantages | Personnalisation, unicité, bien-être (90 % des pratiquants rapportent une meilleure humeur). | Rapidité, efficacité, production à grande échelle, intégration AI/3D. | Esthétique unique, valeur artisanale, motifs complexes. | Production rapide, motifs précis, coûts réduits pour volumes élevés. | Flexibilité des motifs, texture douce, accessible aux débutants. | Efficacité, uniformité, intégration de technologies avancées. |
Inconvénients | Lent, non scalable, dépend des compétences de l’artisan. | Moins d’unicité, n’imite pas les ouvrages fait main | Extrêmement lent, compétences rares, coût élevé pour le temps investi. | Moins d’authenticité, dépendance aux machines coûteuses. | Plus lent que l’industriel, limité par les compétences. | Moins de personnalisation, impact environnemental élevé. |
Exemple de marché | Etsy, Ravelry, marchés artisanaux locaux. | Industrie textile (ex. Inde, Chine), exportations vers l’UE/USA. | Haute couture, musées, collectionneurs. | Lingerie, décoration de masse. | Boutiques artisanales, plateformes comme Ravelry. | Industrie de la mode, textiles techniques (ex. Nike, Adidas). |
L’histoire de la technique au crochet
Des origines incertaines
Nous savons que nos aïeux crochetaient le soir au coin du feu, mais sait-on vraiment d’où vient le crochet ? Remonter le fil de l’histoire n’est pas une mince affaire… On considère aujourd’hui que le tricot et le crochet ont le même ancêtre : le Nalebinding (« lier avec une aiguille » en Danois). Cette technique apparaît dès la fin de l’Antiquité, comme le prouvent de nombreux objets retrouvés aux 4 coins du monde : en Amérique du Sud (bonnets et châles attribués à des civilisations précolombiennes du Pérou), en Afrique du Nord (chaussettes coptes d’Égypte du IVe siècle), en Europe du Nord, en Asie… Il n’est pas exclu que le berceau du Nalebinding (et donc du crochet) se trouve quelque part sur la route de la soie !
L’apparition du crochet en Europe
En Europe, cette technique semble s’être développée au XVIIIe siècle dans les campagnes écossaises. En 1812, une certaine Elizabeth Grant évoque la technique sans vraiment la nommer dans son autobiographie « Mémoires d’une femme du Highland ».
À l’époque, l’outil ressemble déjà beaucoup à celui qu’on connaît aujourd’hui : une sorte d’hameçon en os, en ivoire, en métal ou en buis. Ce type d’aiguille recourbée était également connu et utilisé en France : en 1763, le crochet figurait déjà sur une planche d’illustration de l’Encyclopédie Diderot consacrée à l’aiguille à tambour.
Dans les années 1820, en Hollande, le magazine Penelope est le premier à donner des instructions de crochetage. Bien qu’on le nomme parfois « crochet de berger » ou « hameçon de berger », le terme « aiguille à crochet » fait son apparition. Plusieurs pays revendiquent son invention, notamment l’Angleterre, l’Allemagne, l’Écosse et la France… Difficile d’y voir clair !
1845-1910 : le succès de la dentelle au crochet irlandaise
Au milieu du XIXe siècle, l’Irlande connaît une crise économique majeure. Dans les classes les plus aisées, les femmes manient le fil de coton et le crochet depuis longtemps, imitant les précieuses dentelles à l’aiguille ou au fuseau venues d’Espagne et d’Italie.
Face à cette misère, religieuses et dames de bonne société décident de transmettre leur savoir-faire aux plus démunis. Elles mettent en place des ateliers dans tout le Nord du pays et y enseignent la dentelle au crochet aux hommes, aux femmes et aux enfants… Tous les volontaires sont les bienvenus, sans distinction ! Cette dentelle élégante et accessible est bien dans l’air du temps, les commandes affluent… Rapidement, une véritable industrie se développe, capable d’assurer un revenu régulier aux plus pauvres. Grâce à cette initiative, les travaux de dentelle au crochet ont sauvé un nombre considérable de foyers irlandais modestes durant la Grande Famine de 1845 à 1852.
Cette technique qui n’était au départ qu’une imitation a affirmé son style, s’inspirant de motifs traditionnels irlandais (trèfles, roses…) Pendant la seconde moitié du XIXe siècle, de nombreux ouvrages consacrés au crochet sont publiés dans toute l’Europe, permettant d’apprendre la technique et de trouver facilement des modèles. Jusqu’à la première Guerre Mondiale, la dentelle au crochet d’Irlande a continué de s’exporter un peu partout en Europe, offrant à de nombreux Irlandais les moyens financiers d’émigrer aux États-Unis.
Au XXe siècle : entre grandeur et décadence
La dentelle au crochet connaît son apogée au début du XXe siècle avec des ouvrages aussi fins que complexes, de plus en plus élaborés et sophistiqués. Malgré ce degré de technicité, sa côte de popularité décline à partir des années 1920. Concurrencé par l’apparition de la dentelle mécanique, le crochet cesse d’être une industrie et reprend son statut d' »ouvrage de dames », un simple hobby que l’on pratique chez soi.
Après la seconde Guerre mondiale, les femmes au foyer américaines s’entichent de ce passe-temps. Elles rafraîchissent la technique en utilisant des fils de laine plus épais et inventent au passage de nouveaux modèles très colorés. Le crochet connaît une nouvelle heure de gloire dans les années 1960 et 1970 avec les patchworks en granny square, avant d’être considéré comme le summum de la ringardise jusqu’à la fin du XXe siècle.
Le XXIe siècle renoue avec le crochet
Aujourd’hui, le crochet s’inscrit dans la tendance slow fashion actuelle, comme tous les travaux d’aiguille. Les créateurs de mode ont redécouvert à quel point cette dentelle rustique pouvait être raffinée. Chez Gucci, Alexander Mc Queen, Céline ou Dolce & Gabanna, les dernières collections printemps-été ont prouvé que le crochet pouvait inspirer bien d’autres créations qu’un couvre-théière ! Dépoussiéré, modernisé, le crochet a officialisé son grand retour, décliné sous la forme de sacs XXL, de robes et de tops arachnéens, de chaussures et maillots de bain ajourés… En déco, les ouvrages au crochet retrouvent une place dans nos intérieurs. Les napperons tristounets relégués aux vide-greniers sont remplacés par des amigurumis, corbeilles et plaids crochetés… sans nostalgie !
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L’Essor du Crochet : Tendances et Impact Culturel
Le crochet, technique artisanale aux racines historiques profondes, connaît un regain de popularité à l’échelle mondiale, porté par des dynamiques modernes telles que la recherche de durabilité, les bienfaits thérapeutiques et l’essor des plateformes numériques de vente pour particuliers. Selon une étude de Business Research Insights, le marché mondial du tricot et du crochet était évalué à 0,208 milliard USD en 2024 et devrait atteindre 0,3016 milliard USD d’ici 2033, avec un taux de croissance annuel composé (TCAC) de 4 %. Ce dynamisme est particulièrement marqué en Amérique du Nord et en Europe, où la demande pour des produits artisanaux et durables croît constamment. La pandémie de COVID-19 a amplifié cette tendance : une augmentation de 75 % des ventes de produits liés au crochet a été observée entre 2020 et 2022, les individus cherchant des activités créatives pour occuper leur temps et réduire le stress, selon Edin Yarn Fest. En 2023, le marché des robes au crochet a atteint une valeur de 1,68 milliard USD, avec une projection de croissance à 2,11 milliards USD d’ici 2030, à un TCAC de 3,9 %, d’après Virtue Market Research. Cette croissance est alimentée par une demande accrue pour des vêtements faits main, notamment auprès des 18-34 ans, qui représentent 34 % des adeptes du crochet aux États-Unis. Les réseaux sociaux, comme TikTok et Instagram, ont amplifié cette popularité, avec plus de 100 000 recherches mensuelles pour des vêtements au crochet, reflétant un intérêt pour des pièces uniques et éloignées de la fast fashion. Les plateformes comme Etsy et Ravelry ont permis aux artisans de toucher un public mondial, renforçant la portée du crochet. L’accent mis sur les matériaux écologiques, comme le coton biologique ou les fils recyclés, répond à une demande croissante pour une mode écoresponsable : 60 % des acheteurs de robes au crochet en 2023 citaient la durabilité comme principal facteur d’achat. Le crochet s’inscrit ainsi dans le mouvement de la slow fashion, valorisant la qualité et l’authenticité.
Outre son impact économique, le crochet séduit par ses bénéfices psychologiques et sociaux. Une étude de 2014 du Craft Yarn Council a révélé que 90 % des 3 178 crocheteurs et tricoteurs interrogés estiment que cette activité améliore leur humeur, 85 % y trouvent un moyen de relaxation et 76 % un outil pour gérer les défis de santé mentale. Ces avantages expliquent pourquoi le crochet attire une démographie variée, avec 71 % de femmes et 29 % d’hommes parmi les adeptes, brisant les stéréotypes de genre. En 2023, environ 45 millions d’Américains pratiquaient le crochet ou le tricot, dont 36 % dans la tranche d’âge 35-54 ans, suivis par les 18-34 ans.
Le crochet, qu’il soit pratiqué à la main ou à l’échelle industrielle, s’impose comme une pratique artisanale et technique en pleine évolution, portée par des tendances modernes et une communauté dynamique. Le crochet manuel séduit par son authenticité et ses bienfaits thérapeutiques, tandis que le crochet industriel, avec ses machines automatisées, démocratise les produits textiles complexes tout en intégrant des innovations comme l’IA pour une production optimisée. En 2025, les tendances vers la durabilité, les projets inspirés de la culture pop et les palettes de couleurs naturelles continuent de façonner cet art intemporel.
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