La mode unisexe et les vêtements « sans genre » en 2023

mode unisexe textileaddict

Collection ©Eckhaus Latta

 

Décomplexée, de plus en plus populaire, la mode unisexe poursuit son essor. La tendance à l’ambivalence, au décloisonnement des genres se confirme, notamment auprès des jeunes consommateurs, avides de liberté vestimentaire.

Les marques n’hésitent plus à s’engouffrer dans ce secteur d’avenir qui a perdu son image transgressive. Elles sont de plus en plus nombreuses à s’affranchir des conventions. Où en est la mode unisexe en 2023 ?

 

 

Mode unisexe : où en est-on en 2023 ?

 

Les vêtements sans genre, nouvelle norme admise

La binarité n’est plus la seule norme admise, comme le prouvent les consommateurs issus de la génération Z. Bien décidés à ne plus envisager le genre comme un carcan, ils sont beaucoup plus nombreux que leurs aînés à faire leur shopping du côté du sexe opposé. En magasin, seuls 44 % des consommateurs issus de la Gen Z se cantonnent au rayon dédié à leur genre présumé (54 % pour la génération Y) d’après une enquête WundermanThomson de 2016.

Cette attitude est en train de rentrer dans les moeurs, facilitée par la mode qui affiche clairement sa volonté de rompre avec les stéréotypes de genre. Depuis une dizaine d’années, plus besoin de piocher dans le vestiaire d’en face pour avoir un look androgyne. La tendance unisexe s’inscrit pleinement dans l’époque : en assouplissant les codes vestimentaires, elle réduit par la même occasion la pression sociale.

Ni masculine, ni féminine, parfois les deux, la mode unisexe ou genderfluid constitue une « troisième voie » en plein essor qui se veut accessible à toutes et tous.

Au départ cantonnées aux univers sportswear/streetwear, les collections non-binaires se multiplient, libres de genre mais pas dépourvues de style. Ce terme relativement fourre-tout englobe les vêtements mixtes (sans genre) et dans une moindre mesure, les vêtements cross genrés, des pièces traditionnellement féminines transposées au vestiaire masculin (et vice versa).

Au-delà des traditionnelles catégories « homme » et « femme », la catégorie unisexe est de plus en plus représentée, toutes gammes confondues. Les marques les plus engagées ne proposent quant à elles que des pièces genderless. Cette liberté est offerte dès le plus jeune âge, avec l’émergence de marques proposant des collections neutres pour enfants.

La tendance est en hausse, observée parmi les jeunes marques et les grandes griffes, mais aussi dans la grande distribution. Pour moderniser leur image de marque, les grandes enseignes n’hésitent plus à proposer au grand public des vêtements non genrés et des accessoires à porter au féminin ou au masculin, photos de mannequins à l’appui.

 

 

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La mode unisexe, oui mais…

Flamboyante lorsqu’elle garde l’esprit libre et créatif, la « mode unisexe » s’avère décevante lorsqu’elle se réduit à une opération de genderwashing. Entre avant-gardisme et tour de passe-passe, la frontière est parfois ténue, laissant le consommateur perplexe. Que dire face à des hoodies, joggings, t-shirts unis et autres basiques, adoptés depuis longtemps par les deux sexes et désormais estampillés « sans genre » ?

En effet, les vêtements mixtes ne sont pas une nouveauté et le vestiaire femme est – depuis longtemps – largement imprégné des codes masculins. Quoi qu’il en soit, malgré l’évolution des mentalités, le monde semble encore frileux à l’idée de banaliser les vêtements crossgenrés, et les hommes pas si pressés de s’approprier les pièces à forte connotation féminine. Work in progress ?

Par ailleurs, les vêtements mixtes bénéficient d’une bien meilleure visibilité grâce à ce coup de projecteur général. Ils séduisent le public, mais quid de leur conception ? Si ces pièces ambivalentes sont, en théorie, taillées pour toutes les morphologies, elles ne le sont pas forcément en pratique. Du point de vue des consommateurs, il n’est pas rare de remarquer un manque d’inclusivité : coupes pas toujours adaptées aux particularités physiques de chacun(e), éventail de tailles (ou de pointures) trop réduit…

Maintenant que les frontières entre vestiaire masculin et vestiaire féminin s’estompent, une réflexion reste à mener pour aller vers plus de subtilité. En envisageant, pourquoi pas, de nouvelles façons de concevoir les collections, avec plus de tailles et des alternatives de coupes ?

 

Un secteur en pleine croissance

La remise en question de la binarité est un profond changement sociétal qui suscite l’apparition de nouveaux choix de consommation. La mode ne s’y trompe pas : restreints dans le meilleur des cas, voire inexistants il y a une décennie, les espaces réservés à la mode unisexe prennent de plus en plus de place dans les boutiques, physiques ou virtuelles.

À l’échelle mondiale, ce secteur connaît une forte croissance. Selon les observations de la marketplace BtoB Joor, le nombre de marques proposant des vêtements et accessoires unisexe a augmenté de 40 % entre 2019 et 2023. En hausse régulière depuis 5 ans, la demande dans la catégorie unisexe a augmenté de 46 % par rapport à l’année précédente, avec une très forte progression pour les sacs et accessoires mixtes. D’après les prévisions de Joor, cette hausse devrait se poursuivre dans les années à venir.

 

 

mode unisexe Gucci MX textileaddictCollection ©Gucci MX

 

 

Quelques marques unisexes

 

Alors que l’univers luxueux de Gucci se diversifie avec Gucci MX, une collection dépourvue de genre, la tendance unisexe se démocratise de manière (beaucoup plus) abordable chez Asos, qui a lancé sa ligne mixte Collusion. En Australie, la marque australienne Pac Sun s’adresse à tous, y compris aux kids, qui peuvent tout comme leurs parents dénicher des vêtements sportswear dans l’air du temps.

Le phénomène unisexe touche aussi le domaine de la friperie grâce à Elisea Vintage. Cette boutique toulousaine, présente exclusivement sur Instagram, ne se fonde sur aucun critère de genre pour sélectionner des vêtements de seconde main.

À côté des griffes en vogue les plus inclusives ( Youths in Balaclava, Eckhaus Latta…) il y a aussi les marques établies qui font preuve d’ouverture d’esprit, sans être à proprement parler des marques unisexes. Wales Bonner, Ami Paris, The Frankie Shop ou Ann Demeulemeester se démarquent ainsi avec leurs collections ambivalentes, composées de pièces androgynes faciles à décliner.

 

 

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Image de Elsa Laurent

Elsa Laurent

Designer dans l’industrie textile en habillement et en ameublement, je suis co-fondatrice de Textileaddict.me depuis 2017. J'aime partager mes connaissances et bons plans du textile mode et maison. Mon objectif : permettre aux acteurs du secteur de se mettre facilement en relation pour développer leurs projets.